La phase d'analyse de la situation a permis d'identifer des groupes de clients qui n'attendent pas la même chose de leurs fournisseurs. Mais il a aussi été mis en évidence que les attraits qu'ils présentent ne sont pas les même pour nous compte tenu de notre orientation stratégique et de notre culture : certains peuvent ne pas nous plaire, mais très bien convenir à un concurrent.
Dans la mesure où l'on ne possède pas 100% de part de marché, il serait un peu masochiste de ne pas se focaliser sur les types de clients qui nous paraissent les plus attirants et d'éviter au maximum ceux dont l'idée de les servir vaut pensum.
Pour chacun des types de client identifiés, il faut maintenant choisir ce que l'on veut en obtenir et en déduire ce qu'il nous faudra faire pour chacun d'eux aussi bien au plan rationnel que irrationnel.
On est maintenant en mesure de porter un jugement raisonné sur chacun des types de clientèle selon une classification allant de -- à ++ en passant par 0. Pour chacun d’eux, l’équipe opérationnelle évalue les attraits que ces clients présentent pour nous puis le charme que nous avons à ses yeux, c'est-à-dire la manière dont nous sommes capables de répondre à ses exigences comparativement à la concurrence (au royaume des aveugles, les borgnes sont rois). Soyons conscient qu’un type de clients peut être très attractif sans que la réciproque soit vraie.
Chaque type est alors localisé dans une matrice Attrait / Atouts comme montré ci-dessus. La disposition y est extrêmement variable selon les activités. On peut d’ailleurs représenter chaque type par un cercle dont la surface est proportionnelle à son importance quantitative … mais elle a déjà été prise en compte lors de l'énumération de ses caractéristiques.
La phase d’analyse de la situation se termine ainsi.
La nouvelle phase du plan marketing a pour finalité de choisir quels types de clients on choisira de servir en priorité.
Leur sélection se fera en fonction de notre aptitude à les bien servir (compte tenu de leurs exigences), mais avec profit (compte tenu de leurs attraits). Cela conduira à la détermination d'une Ambition par segments et de Cibles / Objectifs ; à y atteindre à moyen terme (le plus souvent environ trois ans).
Il s'en déduira, dans la phase suivante, le choix :
- de Politiques (manières de faire) associées ; et cohérentes,
- d'Offres définies non selon les composantes du MIX classique, mais selon les concepts de Serpro Serpro = Ceux des produits et services qui permettent au client de créer de la valeur., Noval Noval = Les produits et services qui ne peuvent être évités, mais qui ne permettent pas au client d'enrichir son offre., Relationnel et Contrepartie adaptées aux attentes de chaque segment,
- des grandes Actions à entreprendre pour cela avec les Moyens correspondants.
Selon le positionnement d’un type de clientèle dans l’une ou l’autre des trois zones définies, l’ambition et les objectifs doivent répondre aux grandes orientations indiquées.
- La maximisation de la part de marché dans un segment opérationnel ne veut pas dire d’en prendre 100% d’une part parce que les clients ne voudraient sans doute pas d’un seul fournisseur et d’autre part certains concurrents pourraient y réagir violemment … ce qui y réduirait la rentabilité en faisant glisser vers le bas son positionnement.
- La minimiser ne veut pas dire y être totalement absent. Il peut être judicieux d’y garder un pied pour pouvoir y mener des actions de rétorsion contre des concurrents qui y sont bien implantés et qui se montreraient trop empressés auprès de clients auxquels nous tenons.
- Dans la zone médiane, les moyens dont on dispose globalement ne permettent habituellement pas de faire glisser tous les segments qui s’y trouvent dans la zone plus favorable. Il faut accepter de laisser en régresser certains en diminuant les ressources qui y sont dévolus pour les affecter aux autres : c’est un choix difficile.
L’Ambition est à moyen terme l’analogue de l’Orientation Stratégique à long terme. Cette dernière va se décliner en une somme d’Ambitions qui expriment les variations de part de marché dans chaque segment de type de clientèle.
On peut noter ici que, parce qu’il ne s’agit pas d’une segmentation classique qui de plus n’est pas connue des concurrents, la logique des évolutions du portefeuille de clientèle qui en résulteront seront indéchiffrables pour eux ce qui minimise leurs actions défensives : ils ne comprennent pas qu’il s’agit d’un remaniement méthodique de notre portefeuille de clients. Notre comportement leur paraît le fruit du hasard des occasions, ce qui nous permet de leur échanger un client attractif pour nous contre un qui l’est moins, mais qui peut l’être plus pour le fournisseur qui le récupère : cela peut même être un jeu gagnant-gagnant entre concurrent, mais c’est nous qui tirons les ficelles.
Augmenter, maintenir ou réduire sa part de marché dans un segment ne demande pas d’explications supplémentaires. L’Ambition Yoyo sera la variable permettant les ajustements à court terme d’optimisation de la marge. C’est auprès de ces clients que notre tactique apparaîtra peu suivie, mais ce sera habituellement auprès de clients ayant ce genre de comportement et volontaire pour ne pas perturber les autres secteurs.
Pour ne pas rester dans le vague, chaque Ambition est flanquée d’un repère quantitatif à 3 ans (généralement une part de marché cible ou un chiffre d'affaires ou une quantité commandée ou … ).
Cet horizon de 3 ans n’est pas lié à l’inertie de l’activité en cause (électronique hyper réactive ou pharmacie à évolution lente), mais à celle de la clientèle en général : il faut quelques années pour successivement, apprendre à le connaître, puis l’apprivoiser, enfin le fidéliser.
Face à une Orientation Stratégique unique (Développement, … , Abandon), des Ambitions différentes selon les segments donnent, dans le respect global du vouloir à long terme, de mener des mouvements de portefeuille de sens contraires. Il en sera de même au plan tactique avec les segments classés en Yoyo.
Le tableau joint reprend le positionnement des segments dans la matrice Attraits / Atouts en explicitant par des flèches le déplacement voulu pour chaque Ambition.
Les objectifs de quantités à livrer entre l’année en cours et 3 ans plus tard montrent bien une croissance globale avec des variations par segment pouvant être très importantes.
Ce dernier chapitre du plan marketing va tirer les conséquences pratiques de tout ce qui précède dans un enchaînement logique.
Lorsque l’objectif quantitatif est fixé, il faut se demander comment faire pour l’atteindre.
La première étape est d’expliciter la manière d'y arriver : la politique spécifique à appliquer à chaque segment-type en fonction de l’Ambition affichée.
Cette politique sera ensuite explicitée par les composantes de l’offre qui sera faite au client … ce qui exigera les moyens correspondants à leur confection.
D’une manière générale, la politique à appliquer avec assiduité pendant quelques années dépend de l’Ambition :
- Augmenter va demander de satisfaire les Exigences des clients à 110%
- Maintenir pourra se contenter de le faire entre 90 et 100%.
- Réduire descendra vers 50 à 60%, mais pas chez tous les clients en même temps pour éviter une débandade qui ne pourrait être compensée instantanément par des clients plus séduisants. C’est au chef produit de piloter l’acquisition de nouvelles part de marché chez les “Augmenter“ et ensuite de décider quel client va voir restreindre la satisfaction de ses Exigences. Il arrive qu’il s’en étonne et qu’en lui expliquant pourquoi il n’est pas assez attractif, il décide de modifier sa politique achat pour migrer dans un autre segment.
- Yoyo permet de ne pas se fatiguer à concevoir de politique à moyen terme … puisque l’on ne pratiquera que des tactiques à court terme.
Pour illustration des exemples de politiques. Il ne s’agit pas de faire de longues phrases et d’en écrire plus de 5 ou 6 lignes.