Mark@gement

un management humaniste tendu vers les clients

L'Autre

Flou


1) Un ami m’a raconté une expérience qu’il a vécu avec des moines Chartreux. Malgré leur habitude de n’avoir que très peu de contacts avec des personnes extérieures, ce directeur opérationnel d’un groupe industriel, par un concours de circonstances rares, a eu l’occasion de discuter de politique sociale et notamment de licenciements au sein de l’entreprise avec deux d’entre eux.

Outre son étonnement de découvrir à quel point ils étaient au courant de beaucoup de chose concernant ce problème d’éthique au cœur du management, il a été abasourdi lorsque, au bout d’une demi-heure d’échange, il lui a été demandé cinq minutes de silence qu’il occuperait comme bon lui semble : attente, méditation, rêverie, prière, ... Malgré ses protestations que le temps leur était trop compté pour le perdre ainsi, ses interlocuteurs sont restés fermes.

La même demande lui a été adressée trois fois de suite et l’intéressant est ce qu’il a ressenti. La première fois, ce fut l’ennui d’attendre la fin de ce silence. La deuxième, il s’est demandé quel pouvait être l’intérêt de cette manière de faire. La troisième, “quelque chose” s’est passé en lui, mais sans qu’il ait eu le temps de l’identifier … car les cinq minutes s’étaient écoulées !

2) Pratiquant un peu les mots croisés, je suis étonné de l’aptitude du cerveau à trouver un mot à partir d’une définition, le plus souvent indirecte (on joue sur les divers sens d’un mot en tentant de les emmêler pour rendre le jeu plus amusant) et de lettres éparses. J’ai constaté qu’il faut laisser son esprit “flotter” pour avoir le plus de chance qu’il vous suggère une solution.

J’ai aussi constaté que souvent, après avoir calé le soir sur une définition, la solution était devenue évidente le lendemain … de là à penser que le sommeil a servi pour le “lâcher prise” …

Il me semble qu’il y a là deux démarches se rapprochant de l’épochè. La “pause” qui est recommandée au bout de deux heures de réunion relève de la même logique, par contre un temps de silence au milieu d’une réunion serait plus révolutionnaire et … peut-être (ou sans doute) fructueux, car plus d’une fois, je me suis surpris à lâcher le fil d’une discussion en cours, car j’avais besoin de méditer ce qui venait de se dire … il faut donner au cerveau le temps de structurer les idées nouvelles pour nous qui sont émises par les autres participants : il faut pouvoir les relier à nos paradigmes habituels à défaut de devoir en élaborer un nouveau … ce qui est plus rare.

Un manager doit se réserver des moments pour laisser son esprit flotter … mais il lui faut persévérer pour que des idées nouvelles émergent … un peu comme s’il fallait que le cortex se taise pour que le subconscient laisse filtrer des informations.